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Imagerie post-opératoire normale, "images-pièges"

 
    
 
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 En période post-opératoire digestive, comme dans toute autre circonstance, il faut s'escrimer à recueillir les informations nécessaires à la compréhension et à l'interprétation de l'examen. C'est-à-dire qu'il faut connaître le contexte dans lequel on se trouve.
En effet, une même image peut être interprétée différemment en fonction du contexte post-opératoire. Elle sera considérée comme normale ou supecte de complication en fonction des données qui nous seront fournies (par exemple, pneumopéritoine, épanchement liquidien...)
 
  
S'enquérir du contexte.....
  • La chirurgie : les 4 questions primordiales
  • - Quel est le type de chirurgie réalisée (montage chirurgical, coelioscopie ou laporotomie?..)
    - Quel est le délai par rapport à la chirurgie?
    - Quelle est l'indication du geste chirurgical (carcinologique, infectieuse, ischémique, chirurgie programmée ou en urgence...)?
    - Y-a-t il eu des incidents ou difficultés per-opératoires?

  •  Le patient
  • - Etat clinique : Etat hémodynamique, fièvre, douleur,
    - Modules de drainage, appareillage : Drains, lames, sonde, stomie...
    - Examens complémentaires : Bilan biologique, etc...

  • Le chirurgien
  •  - Quelles sont ses suspicions cliniques?
      

...Pour interpréter les images élémentaires individualisées : imagerie normale et "images-pièges" 

Dans un contexte post chirurgical, il est parfois difficile de faire la part des choses entre l'aspect post-opératoire normal et une éventuelle complication débutante. Il faut alors savoir se limiter à la simple description des signes scanographiques sans donner une interprétation trop tranchée et contrôler quelques jours plus tard l'imagerie. En effet parfois seule l'évolution nous permettra d'infirmer ou de confirmer nos hypothèses initiales.  

  • L'anatomie normale n'est plus respectée (1)
  • Il faut savoir que, les barrières anatomiques normales étant modifiées du fait des sections des ligaments péritonéaux et du mésentère, les collections liquidiennes post-opératoires peuvent donc se développer dans des zones anatomiques inhabituelles voire inattendues. 


  • Le pneumopéritoine (2, 3, 4, 5, 6, 7)

  • Le scanner est le meilleur examen, le plus sensible pour rechercher un pneumopéritoine post-opératoire (3, 4). Son étude nécessite d'élargir les fenêtres de lecture.

Il est normal de retrouver un pneumopéritoine en période post-opératoire précoce, après coelioscopie et laparotomie. Il ne doit jamais être abondant et doit régresser constamment pour disparaître progressivement dans la première semaine post-opératoire (4). Cependant, certains auteurs ont décrit des pneumopéritoines persistants jusqu'à 4 semaines après la chirurgie (7). S'il persiste un module de draînage, le pneumopéritoine peut se prolonger davantage et peut même progresser en cas de mobilisation récente des drains ou lames (5). Il sera retrouvé volontiers dans la zone chirurgicale et dans les endroits électifs selon la théorie de la dynamique des fluides. Après coelioscopie, le pneumopéritoine est moins abondant et régresse plus rapidement, car le gaz insufflé est du CO2 plus facilement réabsorbé par l'organisme que l'air ambiant dont est formé le pneumopéritoine après une chirurgie ouverte.

Tout pneumopéritoine abondant ou se majorant ou s'associant à une importante infiltration de la graisse ou à un épanchement péritonéal liquidien ou à des collections ou à une fuite extra digestive de produit de contraste digestif est compatible avec un pneumopéritoine pathologique secondaire à une perforation digestive traumatique ou à une fistule anastomotique.
Exemple : Pneumopéritoine et infiltration liquidienne péritonéale abondante après perforation duodénale.

Une étude de1993 (3) qui étudie la sémiologie du pneumopéritoine physiologique post laparotomie retrouve les valeurs suivantes : 87% des scanners normaux à J3 (versus 53 % des ASP) et 50% à J6 (versus 8 % sur ASP) présente un pneumopéritoine de façon physiologique. Sa localisation la plus fréquente est en avant du foie et au contact de la paroi abdominale antérieure. Les autres localisations fréquentes sont le cul-de-sac de Morison, le mésentère et le cul-de-sac de Douglas.

Les facteurs influençant l'importance du pneumopéritoine sont discutés. Cependant, les patients obèses présentent un pneumopéritoine physiologique moins abondant, en raison d'une moindre importance des espaces péritonéaux libres (4). Pour certains auteurs (3), il n'y a pas de corrélation significative entre le pneumopéritoine (présence, quantité) et l'âge du patient ou le geste chirurgical réalisé (exclusivement par laparotomie).

Pour Gayer (5), l'obésité, le sexe féminin et la persistance de pneumopéritoine à distance de la chirurgie sont des arguments prédictifs de fistule ou perforation digestive.
  

  • L'épanchement liquidien péritonéal

Il est fréquent et normal en période post-opératoire précoce. Il est visible souvent au regard de la zone chirurgicale mais du fait des remaniements chirurgicaux, peut également siéger dans des zones inhabituelles. Tout comme le pneumopéritoine, il doit régresser progressivement. Une petite collection liquidienne au contact d'une anastomose peut correspondre à un aspect post-opératoire physiologique (collection sérique éphémère et fugace physiologique) mais peut également être le seul signe initial d'une fistule anastomotique (1). Il est parfois impossible de définir le caractère suspect ou pas de cet épanchement localisé sur un seul scanner. Par contre, un épanchement liquidien qui progresse, qui s'enkyste, dont la densité n'est pas parfaitement liquidienne (> 20 UH) ou qui s'associe à un pneumopéritoine progressivement croissant est suspect de complication. (2)  

  • L'infiltration de la zone opératoire

Elle est très fréquente, souvent due aux contraintes mécaniques pendant la chirurgie. Elle doit régresser sur les contrôles scanner successifs. Par contre, elle sera suspecte si elle s'accompagne d'une collection mixte (air+liquide), d'un pneumopéritoine abondant, d'une fuite extra digestive de produit de contraste.

   differentes_anastomoses

  • Le montage chirurgical

- Il doit être scrupuleusement recherché et analysé en ayant bien entendu recueilli au préalable toutes les informations nécessaires à son étude. L'anastomose peut se faire entre deux segments de même nature (colo-colique, grêlo-grêlique...) ou de nature différente (pancréatico-jéjunale, hépatico-jéjunale, gastro-jéjunale...).
- La région anastomotique sera plus facile à identifier en cas d'anastomose mécanique. Parfois, seule une disparité de calibre entre le segment d'amont et le segment d'aval est visible surtout en cas d'anastomose latéro-latérale manuelle. Par contre, une anastomose termino-terminale manuelle peut ne pas être visible. 
- L'anastomose peut être manuelle (suture avec du fil chirurgical) ou
 mécanique (agrafes). Il n'a pas été démontré de supériorité d'un type d'anastomose sur l'autre.
- Elle peut être termino-terminale, termino-latéralelatéro-terminale, latéro-latérale.
- Le montage latéro-latéral est préconisé lorsque les deux segments anastomosés n'ont pas le même calibre. Les anastomoses latéro-latérales et latéro-terminales, peuvent être à l'origine, du fait du péristaltisme, d'un allongement ou d'une distension du ou des moignons intestinaux, responsable d'un risque de pullulation microbienne.
Une anastomose latéro-latérale peut être anisopéristaltique ou isopéristaltique.
  

 

  • L'iléus réflexe

En période post-opératoire immédiate, il persiste presque toujours un iléus de l'intestin grêle lié à l'arrêt du péristaltisme, visualisé en TDM sous forme d'une distension des anses grêles et parfois du colon. Il dure habituellement 48heures, il peut cependant persister 2 à 4 jours. Les facteurs favorisant sont la complexité de l'intervention et la manipulation importante des viscères (8).

 

  • Phénomènes adhérentiels 

Les anses grêles sont accolées à la paroi abdominale antérieure, leur donnant un aspect agglutiné.

 

  • Les modules de drainage
  • Il s'agit soit de lames et drains. Ils sont souvent discrètement radio-opaques, leur extrémité doit drainer la zone chirurgicale. S'ils ont été otés, il est important de noter la date d'ablation et le délai écoulé depuis cette ablation ; En effet, un pneumopéritoine persiste plus longtemps en cas de drainage (sans caractère suspect) et peut même progresser en cas de mobilisation récente des drains ou lames. Dans ce cas, les bulles de pneumopéritoine sont fréquemment retrouvées le long du drain ou à proximité.
     
     
  • Le curage ganglionnaire
  • Il persiste une infiltration dense voire un épanchement liquidien au regard de la zone de curage ganglionnaire. Un lymphocèle peut également se développer. 

     
    
  • La compresse hémostatique

Son aspect est souvent trompeur, mimant un abcès : comblement hétérogène, enfermant quelques microbulles de gaz au sein du site opératoire. Il est fréquemment utilisé dans les cholécystectomies. Exemple

Les agrafes sont utilisées pour les anastomoses mécaniques. Elles sont radioopaques, certaines sont responsables d'artéfacts métalliques.
Les clips sont eux, utilisés pour ligaturer des vaisseaux, des canaux biliaires, ou lors de curage ganglionnaire.
Exemple : Ligne d'agrafage gastrique (Sleeve Gastrectomy)
Exemple : Clips sur branche vasculaire ou biliaire sur tranche de section hépatique

  

 

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Références bibliographiques 

(1)     Kim KW, Choi BI, Han JK, Kim TK, Kim AY, Lee HJ, Kim YH, Choi JI, Do KH, Kim HC, Lee MW. Postoperative anatomic and pathologic findings at CT following gastrectomy. Radiographics. 2002 Mar-Apr;22(2):323-36. Review. PubMed PMID: 11896222.

(2)     E. Lacrosniere, F. Mignon, C. Hubert, B. Fraleux - Le Chesnay, France, Poster électronique JFR 2009 : Revue illustrée des aspects post-opératoires pathologiques des interventions chirurgicales digestives

(3)     Earls JP, Dachman AH, Colon E, Garrett MG, Molloy M. Prevalence and duration of postoperative pneumoperitoneum: sensitivity of CT vs left lateral decubitus radiography. AJR Am J Roentgenol. 1993 Oct;161(4):781-5. PubMed PMID: 8372757. 

 
(4)     Gayer G, Hertz M, Zissin R. Postoperative pneumoperitoneum: prevalence, duration, and possible significance. Semin Ultrasound CT MR. 2004 Jun;25(3):286-9. Review. PubMed PMID: 15272552.  

(5)     Gayer G, Jonas T, Apter S, Amitai M, Shabtai M, Hertz M. Postoperative pneumoperitoneum as detected by CT: prevalence, duration, and relevant factors affecting its possible significance. Abdom Imaging. 2000 May-Jun;25(3):301-5. PubMed PMID: 10823456.

(6)     Aspect post-opératoire du tube digestif, Imagerie de l’abdomen, p.1001, Médecine Sciences publications, Lavoisier, sous la direction de Valérie Vilgrain et Denis Régent, 2010

(7)     Ceydeli A, Fahoum B, Schein M. Delayed post-operative pneumoperitoneum. Dig Surg. 2002;19(5):420-2. PubMed PMID: 12435919.

(8)     Sandrasegaran K, Maglinte DD. Imaging of small bowel-related complications following major abdominal surgery. Eur J Radiol. 2005 Mar;53(3):374-86. Review. PubMed PMID: 15741011.