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Ablation par radiofréquence

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Indications (1, 2)

L’ablation par radiofréquence (ARF) est devenue un des modes de traitement curatif pour les tumeurs hépatiques malignes non résécables primitives (carcinome hépatocellulaire ou cholangiocarcinome) ou des métastases hépatiques (cancer du rectum, colon, pancréas ou poumon...).

 

Le principe de base est la destruction tumorale par radiofréquence. Il s'agit d'appliquer une énergie électromagnétique dans une tissu (tumeur) ce qui induit sa destruction par la chaleur.

 

C'est une méthode sure et efficace pour le traitement des tumeurs hépatiques.
Les bénéfices de cette technique non invasive sont les faibles morbidité et mortalité ainsi qu'une épargne du parenchyme hépatique.
Elle peut être utilisée chez les patients présentant une cirrhose décompensée en attente de greffe hépatique, où en prévenant l'évolution tumorale, elle prolongerait la survie des patients et leur permettrait d'atteindre la transplantation hépatique. Cependant, elle peut potentiellement aggraver la dysfonction hépatique (3, 4) .
Même si le traitement de référence du carcinome hépato-cellulaire reste la résection chirurgicale et la transplantation hépatique, l'ARF est une alternative efficace en cas de contre-indications chirurgicales.

En cas de lésions multiples, l'ARF est possible mais doit traiter toutes les lésions. Il n'y a donc, en principe, pas de limite au nombre de lésions à traiter. Plus la lésion est grande, moins sera efficace l'ARF. Classiquement, La taille de 3-3.5 cm est la limite au delà de laquelle l'ARF est peu recommandée.

L'ARF est contre-indiquée en cas d'anastomose bilio-digestive ; Elle est un facteur de risque de complications infectieuses...(5)

 

Principe et techniques (1, 2) 

Le but de la radiofréquence est d’obtenir la nécrose du tissu cible par thermocoagulation. Pour cela, on introduit des aiguilles-électrodes dans le tissu tumoral qui délivrent un courant alternatif à haute fréquence. Ce courant électrique induit une agitation ionique et une excitation moléculaire entraînant un échauffement tissulaire responsable d'une destruction tissulaire. A partir de 60° C, on obtient de façon quasi-immédiate une dénaturation cellulaire irréversible. L'importance de la destruction tissulaire est corrélée à l'impédance du tissu et à la distance par rapport à l'électrode.

La durée de la procédure dépend de la taille de la lésion. Il existe plusieurs modèles différents d'ablation. A Tours, nous utilisons le dispositif RITA STARBURST (nom commercial) à baleines déployables. L'ARF commence toujours par la zone centrale, puis les baleines sont ouvertes progressivement pour intéresser au final, toute la superficie lésionnelle ainsi que le parenchyme hépatique adjacent.

Comme pour une résection chirurgicale, il faut s’assurer d’avoir une marge de sécurité, il faut donc détruire en plus de la tumeur, une couronne de tissu hépatique de 5 mm d’épaisseur.

L'ARF peut se faire par voie per-cutanée ou au cours d'une intervention chirurgicale au bloc opératoire.
Un guidage par imagerie est nécessaire, classiquement par échographie, voire par scanner.
L’échographie est la technique d’imagerie de choix pour guider la mise en place des aiguilles-électrodes dans le tissu-cible (imagerie en « temps-réel », possibilité d’angulation du trajet de ponction, accessibilité….).

 

 

Imagerie post ARF normale (1, 6) 

  • Il faut toujours comparer le scanner initial avant ARF et post ARF pour juger de l’efficacité de la procédure.
  • L’aspect scanographique post ARF dépend du délai par rapport au geste d'ARF et du degré de succès de la procédure.
  • La zone traitée correspondant à du tissu nécrosé. En post procédure immédiat, elle doit apparaître comme une zone spontanément hypodense, aux limites nettes sans rehaussement après injection de produit de contraste iodé.
  • Le centre peut être en hyperdensité spontanée et correspond à une zone de plus grande dissociation cellulaire et disparaît en quelques semaines ou mois.
  • La zone hypodense doit être de plus gros volume que la lésion en elle-même : En effet, il faut tenir compte des marges de sécurité péritumorales (au moins 5 mm) (7)
  • Un autre aspect typique en post procédure immédiate est un rehaussement périphérique uniforme homogène après injection de produit de contraste : Cet aspect est considéré comme une réponse physiologique à la blessure thermique qu’a subie le tissu hépatique et disparaît progressivement par la suite. Elle peut persister plusieurs mois et correspond à une congestion et/ou à du tissu de granulation.
  • Des petites bulles gazeuses au sein de la cicatrice, produites durant la thermo-coagulation sont possibles en post procédure immédiate sans caractère suspect. Elles ne doivent pas être confondues avec un abcès. (8)
  • Résidu tumoral : Si la zone nécrosée ayant bénéficié de l'ARF ne comporte pas l’intégralité de l’index tumoral, on considère qu’il persiste un résidu tumoral qui nécessitera un traitement complémentaire. Il peut parfois être difficile de différencier un éventuel résidu tumoral (rehaussement artériel) du rehaussement périphérique physiologique de la zone nécrosée : Des indices peuvent orienter le diagnostic : Un rehaussement hétérogène, irrégulier, nodulaire est plutôt en faveur d’un reliquat tumoral ou d'une récidive.
  • A un mois de la procédure, la zone d' ARF apparaît bien limitée, hypodense sans rehaussement après injection de produit de contraste iodé. La cicatrice doit progressivement diminuer. Parfois, cette cicatrice peut rester stable (évolution cas par cas) (2)

 

 

 

Complications aigues et imagerie (9, 10) 

Le taux de complications est de 2-10.6 % ; le taux de mortalité est de 0.1 à1.4% (4).
Ces chiffres
 augmentent en cas de nombre élevé de lésions à traiter, de volume important de nécrose, de score de Child Pugh mauvais, de lésion proche du diaphragme, proche du hile hépatique, proche des vaisseaux et des viscères adjacents (10).

Les complications de l'ARF peuvent être classées en 3 groupes : Vasculaires, biliaires et extra-hépatiques.  
Les complications les plus fréquentes sont l'abcès hépatique, l'hémorragie intra péritonéale, le biliome, la brûlure, la plaie des voies biliaires.

 

  • Complications vasculaires 

  

- Fistule artério-veineuse : exemple

- Thrombose portale : Elle concerne surtout les vaisseaux de petit calibre à flux lent. Cependant, les vaisseaux de plus gros calibre, lorsque le flux portal est ralenti (cirrhose hépatique, thrombose portale pré-existante) peuvent également être touchés. Le scanner montre un thrombus dans la branche portale intra-hépatique et des troubles perfusionnels segmentaires dans le territoire hépatique d'aval (vascularisé par la veine porte thrombosée) à type d’hyper-artérialisation compensatrice.

- Thrombose des veines sus-hépatiques : Thrombus visible, absence de rehaussement de la veine sus-hépatique thrombosée, congestion du parenchyme dans le territoire normalement drainé, rehaussement moindre au temps artériel.

- Infarctus hépatique : Son incidence est faible (0.07%) du fait du double réseau d’apport sanguin dont bénéficie le foie. Il se caractérise par une plage hypodense, sans rehaussement allant jusqu’à la capsule, +/- associé à une aéroportie.

- Hématome sous-capsulaire et hémopéritoine : Ils sont secondaires à la mise en place des électrodes dans la lésion-cible. L’hématome est biconvexe ou en croissant, spontanément hyperdense.
Les facteurs de risque sont une coagulopathie (donc les patients cirrhotiques) et des tentatives multiples de mise en place des électrodes.
Les précautions à prendre : L'électrode doit traverser suffisamment de parenchyme sain sans traverser de gros vaisseaux.

- Pseudo-anévrysme : rare, secondaire à un traumatisme direct par les électrodes ou secondaire à un foyer infectieux focal (abcès…)

 

  • Complications biliaires (11)
  • 

Les complications les plus fréquentes des voies biliaires sont une dilatation modérée des VBIH autour de la zone d'ablation (82%) suivie d'une association dilatation des VBIH-biliome (11.6%) et d'un biliome seul (5.8%). La régression de cette dilatation est variable dans le temps en fonction des patients (généralement en quelques mois mais peut persister). L'ARF n'entraîne généralement pas de complication des voies biliaires extra hépatiques (12).

- Sténose biliaire : Elle est radio-induite et s’associe à une dilatation des canaux biliaires en amont qui peut progresser pendant plusieurs mois, à un biliome et à une atrophie hépatique. Les canaux distaux sont plus sensibles à la thermo-ablation mais leur atteinte est souvent infra-clinique. Lorsque la lésion à détruire est hilaire, il est difficile d’obtenir à la fois la thermocoagulation complète de la lésion et la protection des principaux canaux biliaires et des principales branches portales. Les canaux biliaires proximaux sont théoriquement protégés par le flux porte qui ralentit l’échauffement des tissus, mais leur sténose est plus délétère. La plupart des dilatations biliaires restent infra cliniques et ne nécessitent pas de traitement particulier.

- Biliome :(11, 13) 3.3%. Collection de bile bien limitée visible en dehors de l'arbre biliaire alimentée par une fuite de bile secondaire à une lésion des voies biliaires sur le site de radiofréquence. C'est une complication fréquente mais rarement grave. La localisation et la taille de la tumeur ayant bénéficié d'une ARF n'influent pas sur le risque de formation de biliome. Il n'apparaît pas immédiatement mais plus fréquemment au cours du premier mois après la procédure. 50% des biliomes régressent spontanément sans traitement ni complication. Ils sont rarement symptomatiques.

- Abcès hépatique (14): La clinique est parfois trompeuse car la fièvre fait partie du syndrome post-ARF. La prévalence de la fièvre en post ablation est de l'ordre de 19-34% avec une durée de 1-9 jours. La fièvre devient suspecte au delà de ce délai. C'est une complication majeure de l'ARF, survenant dans 2% des cas, favorisée par les deux grands facteurs de risque que sont la colonisation bactérienne et un diabète, et est quasi constante en cas d’anastomose bilio-digestive, qui est normalement pour cette raison, une contre-indication. En période post-ARF immédiate, des bulles d'air au sein de la zone ayant subi l'ARF sont fréquentes et non spécifiques d'abcès. Ces bulles d'air sont produites pendant l'intervention de radiofréquence et doivent disparaître dans le 1er mois.
Exemple : Présence de bulles gazeuses au sein de la zone ayant subi l'ARF à un mois de la procédure : suspicion d'abcès.

- Hémobilie : Contenu spontanément hyperdense de l’arbre biliaire et +/- caillots dans la vésicule biliaire.

 

  • Complications extra-hépatiques

Il s'agit de lésions traumatiques des organes adjacents à la lésion cible.

- Tractus-gastro-intestinal : Perforation digestive suspectée devant un pneumopéritoine, un épanchement péritonéal liquidien, un épaississement localisé de la paroi digestive, une infiltration de la graisse adjacente, éventuellement un abcès intra ou extra hépatique.

- Plaie de la vésicule biliaire : La perforation directe de la vésicule biliaire est rare sauf si la lésion est proche de la vésicule biliaire. Les signes de plaie de vésicule biliaire sont communs à ceux d’une cholécystite classique (épaississement pariétal de la vésicule, infiltration de la graisse périphérique…). On peut aussi mettre en évidence des bulles de gaz dans les voies biliaires.
Les complications de l'ARF sur la vésicule biliaire sont plus sévères si la distance électrode-vésicule biliaire est inférieure à 0.5 cm ou si la direction de l'électrode est parallèle à la paroi vésiculaire. Les perforations vésiculaires qui en découlent n'apparaissent pas immédiatement après le geste, mais au bout de 7 jours. Ainsi, la distance de sécurité pour éviter les complications thermiques de la vésicule biliaire est de 1 cm entre la vésicule biliaire et l'électrode (15). 

- Pneumothorax, Hémothorax

- Ensemencement tumoral : Fonction du nombre de ponction, du calibre et du type d’électrodes, localisation sous capsulaire de la tumeur, différenciation faible de la tumeur.

- Irritation diaphragmatique : Pour les lésions hépatiques en contact avec le diaphragme. : épaississement diaphragmatique, douleur irradiant dans l'épaule droite (16).

 

 

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Références bibliographiques 

 

(1)     Huynh-Charlier I, Taboury J, Charlier P, Vaillant J, Grenier P, Lucidarme O. Imaging of the postsurgical liver. J Radiol. 2009 Jul-Aug;90(7-8 Pt 2):888-904. Review. French. PubMed PMID: 19752829.

(2)     Park MH, Rhim H, Kim YS, Choi D, Lim HK, Lee WJ. Spectrum of CT findings after radiofrequency ablation of hepatic tumors. Radiographics. 2008 Mar-Apr;28(2):379-90; discussion 390-2. Review. PubMed PMID: 18349446.

(3)     Kim YK, Kim CS, Chung GH, Han YM, Lee SY, Jin GY, Lee JM. Radiofrequency ablation of hepatocellular carcinoma in patients with decompensated cirrhosis: evaluation of therapeutic efficacy and safety. AJR Am J Roentgenol. 2006 May;186(5 Suppl):S261-8. PubMed PMID: 16632686.

(4)     Gillams AR. Liver ablation therapy. Br J Radiol. 2004 Sep;77(921):713-23. Review. PubMed PMID: 15447955.

(5)     de Baère T, Risse O, Kuoch V, Dromain C, Sengel C, Smayra T, Gamal El Din M, Letoublon C, Elias D. Adverse events during radiofrequency treatment of 582 hepatic tumors. AJR Am J Roentgenol. 2003 Sep;181(3):695-700. PubMed PMID: 12933462

(6)     Lim HK, Choi D, Lee WJ, Kim SH, Lee SJ, Jang HJ, Lee JH, Lim JH, Choo IW. Hepatocellular carcinoma treated with percutaneous radio-frequency ablation: evaluation with follow-up multiphase helical CT. Radiology. 2001 Nov;221(2):447-54. PubMed PMID: 11687689.

(7)     Kim KW, Lee JM, Klotz E, Kim SJ, Kim SH, Kim JY, Han JK, Choi BI. Safety Margin Assessment After Radiofrequency Ablation of the Liver Using Registration of Preprocedure and Postprocedure CT Images. AJR Am J Roentgenol. 2011 May;196(5):W565-72. PubMed PMID: 21512046.

(8)     Brook OR, Mendiratta-Lala M, Brennan D, Siewert B, Faintuch S, Goldberg SN. Imaging findings after radiofrequency ablation of adrenal tumors. AJR Am J Roentgenol. 2011 Feb;196(2):382-8. PubMed PMID: 21257891.

(9)     Akahane M, Koga H, Kato N, Yamada H, Uozumi K, Tateishi R, Teratani T, Shiina S, Ohtomo K. Complications of percutaneous radiofrequency ablation for hepato-cellular carcinoma: imaging spectrum and management. Radiographics. 2005 Oct;25 Suppl 1:S57-68. Review. PubMed PMID: 16227497.

(10)     Livraghi T, Solbiati L, Meloni MF, Gazelle GS, Halpern EF, Goldberg SN. Treatment of focal liver tumors with percutaneous radio-frequency ablation: complications encountered in a multicenter study. Radiology. 2003 Feb;226(2):441-51. PubMed PMID: 12563138.

(11)     Chang IS, Rhim H, Kim SH, Kim YS, Choi D, Park Y, Lim HK. Biloma formation after radiofrequency ablation of hepatocellular carcinoma: incidence, imaging features, and clinical significance. AJR Am J Roentgenol. 2010 Nov;195(5):1131-6. Erratum in: AJR Am J Roentgenol. 2010 Dec;195(6):1292. PubMed PMID: 20966318.

(12)     Kim SH, Lim HK, Choi D, Lee WJ, Kim SH, Kim MJ, Lee SJ, Lim JH. Changes in bile ducts after radiofrequency ablation of hepatocellular carcinoma: frequency and clinical significance. AJR Am J Roentgenol. 2004 Dec;183(6):1611-7. PubMed PMID: 15547200. 

(13) Timmerman RD, Bizekis CS, Pass HI, Fong Y, Dupuy DE, Dawson LA, Lu D. Local surgical, ablative, and radiation treatment of metastases. CA Cancer J Clin. 2009 May-Jun;59(3):145-70. Epub 2009 Apr 10. Review. PubMed PMID: 19364702.

(14)     Choi D, Lim HK, Kim MJ, Kim SJ, Kim SH, Lee WJ, Lim JH, Paik SW, Yoo BC, Choi MS, Kim S. Liver abscess after percutaneous radiofrequency ablation for hepatocellular carcinomas: frequency and risk factors. AJR Am J Roentgenol. 2005 Jun;184(6):1860-7. PubMed PMID: 15908543.

(15)     Lee J, Rhim H, Jeon YH, Lim HK, Lee WJ, Choi D, Kim YS. Radiofrequency ablation of liver adjacent to body of gallbladder: histopathologic changes of gallbladder wall in a pig model. AJR Am J Roentgenol. 2008 Feb;190(2):418-25. PubMed PMID: 18212228.

(16)     Head HW, Dodd GD 3rd, Dalrymple NC, Prasad SR, El-Merhi FM, Freckleton MW, Hubbard LG. Percutaneous radiofrequency ablation of hepatic tumors against the diaphragm: frequency of diaphragmatic injury. Radiology. 2007 Jun;243(3):877-84. PubMed PMID: 17517940.