Imagerie du pancréas

  • Augmenter la taille
  • Taille par défaut
  • Diminuer la taille
accueil Index Adénocarcinome

 

ADENOCARCINOME PANCREATIQUE :

 

adenok_portal_imagepresentation_sansfleche  

 

 

 

   adenok_doubleductsign_      adenok_bili_presentation

 

L'adénocarcinome du pancréas est la cinquième cause de décès par cancer en France et la deuxième cause de mortalité par cancer digestif après le cancer colo-rectal(1). Le pronostic est mauvais avec une survie globale à 5 ans < 3,5%. Les facteurs de risque reconnus sont l’âge, le tabagisme, l’obésité et une histoire familiale de cancer du pancréas(2). Le diabète de type 2 et la pancréatite chronique sont des facteurs de risque discutés(3; 4). 
L'adénocarcinome
du pancréas est souvent découvert à un stade évolué devant une anorexie, une perte de poids, des douleurs abdominales et un ictère cholestatique en cas de tumeur de la tête. Les tumeurs corporéo-caudales sont de découverte plus tardive lorsque la masse tumorale est importante ou au stade métastatique. Une poussée de pancréatite aiguë liée à l’obstruction du canal pancréatique principal révèle l'adénocarcinome dans 15% des cas(2).

Au moment du diagnostic, la plupart des tumeurs ont franchi les limites de la glande pancréatique ou sont au stade métastatique, et seuls 15% des patients peuvent bénéficier d’une résection à visée curative. La survie à 5 ans des patients réséqués reste malgré tout inférieure à 20%(5–8).

Le principal but de l’imagerie est donc de faire un bilan d’extension de la maladie le plus précis possible afin de différencier les patients pouvant bénéficier d’un traitement curatif (résection chirurgicale) des patients relevant d’un traitement palliatif (essentiellement une chimiothérapie).

 

Imagerie diagnostique :

 

 Echographie :

L’échographie reste l’examen d’imagerie de première intention dans le bilan d’un ictère ou d’une douleur abdominale. Mais concernant le diagnostic d'adénocarcinome du pancréas, il s’agit d’une technique de débrouillage devant conduire à la réalisation d’un examen TDM. La sensibilité de l’échographie pour le diagnostic de cancer du pancréas est en effet insuffisante, variant entre 55 et 90% selon les auteurs(9–11). Ses principales limites sont les tumeurs de petite taille <2cm, les tumeurs du pancréas gauche et les limites classiques de l’échographie (obésité, interpositions digestives)

L’adénocarcinome pancréatique se manifeste typiquement par une masse hypoéchogène, à contours flous, déformant ou non les contours de la glande. Mais en cas de tumeur de petite taille, les signes indirects sont souvent les seuls retrouvés. Il faudra donc s’efforcer de rechercher(12) :

-       une dilatation du canal de Wirsung (> 3mm) en amont de la lésion

-       une dilatation de la voie biliaire principale associée à une dilatation des voies biliaires intra-hépatiques en cas de tumeur céphalique

-       une atrophie parenchymateuse d’amont

-       un pseudo-kyste secondaire à une pancréatite aiguë d’amont


Tomodensitométrie :

La TDM est l’examen standard de référence pour le diagnostic et le bilan d’extension de l’adénocarcinome du pancréas. Le diagnostic repose comme en échographie sur des signes directs et surtout indirects, parfois seuls présents(12).

  • Signes directs :

-       Syndrome de masse focale tissulaire

-       Hypodense ou parfois isodense spontanément

-       Effet de masse avec déformation des contours de la glande

-       Classiquement moins rehaussée par le contraste que le parenchyme sain adjacent (autre exemple)

 

  • Signes indirects :

-       En cas de tumeur céphalique 

-       Dilatation du canal pancréatique principal

-       Associées elles réalisent le signe de la dilatation bicanalaire (double-duct sign des auteurs anglosaxons), très évocateur du diagnostic d'adénocarcinome du pancréas

-       Atrophie parenchymateuse en amont de l’obstacle tumoral 

  • secondaire à l’obstruction canalaire
  • souvent associée à une dilatation du CPP

-       Infiltration de la graisse péri-pancréatique à proximité de la tumeur

-       Pseudo-kyste d’amont : secondaire à

  • une pancréatite d’amont
  • ou à la rupture d’un canal pancréatique secondaire dilaté 

-       Signes d’extension locorégionale ou à distance

 

  • Pièges et diagnostics difficiles :
  • Lésions isodenses: c’est le cas de 5 à 20% des adénocarcinomes pancréatiques et le diagnostic est alors évoqué par la présence quasi constante des signes indirects. L’IRM permet dans ce cas de mettre en évidence la tumeur en hyposignal T1 hypersignal T2, avec notamment une perte de l’hyperintensité normale du parenchyme pancréatique sur les séquences pondérées T1 Fat Sat.


  • Lésions diffuses: 5% des adénocarcinomes du pancréas concernent de façon diffuse la glande pancréatique. Une perte de la lobulation des contours de la glande, une atteinte vasculaire avec hypertension portale segmentaire sont alors des signes précieux orientant vers l’atteinte tumorale. Le dignostic différentiel se pose avec la pancréatite auto-immune où la délobulation des contours et l’absence de visualisation du canal principal sont fréquemment retrouvés.

 

  • Prise de contraste au temps artériel: exceptionel en cas d’adénocarcinome, sa présence doit faire évoquer une tumeur neuro-endocrine ou une métastase hypervasculaire.

 

  • Absence de dilatation canalaire biliaire et pancréatique: L’absence de dilatation canalaire peut se retrouver dans les tumeurs du crochet et en cas de pancréas divisum avec canal pancréatique dorsal prédominant. Dans les autres cas, elle doit faire évoquer une autre tumeur que l’adénocarcinome.

 

 

  • Cancer et pancréatite chronique: diagnostic différentiel difficile, la pancréatite chronique peut parfois mimer un adénocarcinome, prenant dans certains cas la forme d’une masse avec double dilatation canalaire(13). Le diagnostic est encore plus délicat quand les deux pathologies coexistent.

Les signes TDM en faveur d’une pancréatite chronique plutôt que d’un cancer sont : la présence de calcifications pancréatiques intracanalaires ou intraparenchymateuses, le caractère irrégulier de la dilatation du canal pancréatique principal, une diminution de calibre progressive de la voie biliaire principale au contact de la masse, l’existence de structures liquidiennes au sein de la masse correspondant à des canaux secondaires dilatés ou à des pseudo-kystes. Le développement d’un adénocarcinome au cours d’une pancréatite chronique est presque impossible à diagnostiquer à un stade précoce, les signes de cancer étant le plus souvent rattachés à la pancréatite chronique. Le diagnostic est alors posé à un stade où la chirurgie curative est dépassée (envahissement vasculaire et/ou métastases hépatiques).

 

IRM :

En constant progrès ces dernières années, l’IRM a l’intérêt de coupler à l’imagerie conventionnelle une imagerie spécifique des canaux biliaires et pancréatiques (cholangiowirsungo-IRM) ainsi que des séquences « angiographiques ». Son principal avantage réside dans son excellente résolution en contraste spontané avec une sensibilité et une spécificité diagnostiques élevées (respectivement > à 90% et proche de 80%)(12). L’apport des séquences de diffusion ouvre de nouvelles perspectives quant à la caractérisation lésionnelle. Sa place dans le diagnostic et le bilan d’extension n’est cependant pas clairement définie. Malgré tous ses avantages, son utilisation en pratique quotidienne est limitée par une accessibilité restreinte et une moins bonne reproductibilité que le scanner. L’IRM pourrait voir ses indications élargies au diagnostic des petites tumeurs non vues au scanner, et dans le bilan d’extension hépatique et ganglionnaire pour lequel elle reste supérieure à la TDM.

Voici ses particularités propres :

 

Echo-endoscopie :

Désormais remplacée par le scanner depuis l’apparition des scanners multidétecteurs, l’échoendoscopie est désormais un examen de 3ème intention dans le bilan diagnostique du cancer du pancréas, réservé à certaines situations particulières. Elle est particulièrement performante dans le dépistage des petites tumeurs de <2cm et permet la réalisation de biopsies écho-guidées. L’aspect est le même que celui en échographie standard, retrouvant une masse hypoéchogène, à limites irrégulières. Elle présente par ailleurs l’inconvénient d’être un examen invasif nécessitant une anesthésie générale et un monitoring.

Cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique (CPRE) :

Elle n’est plus utilisée à but diagnostique mais thérapeutique avec la mise en place d’une prothèse biliaire. Elle visualise la sténose bicanalaire et la dilatation d’amont avec un stop brutal et complet au niveau de la tumeur.

 

 

Bilan pré-thérapeutique :

 

 Le but de l’imagerie est d’effectuer un bilan de résécabilité afin de sélectionner les patients pouvant bénéficier d’une exérèse curative sans écarter à tort des malades opérables. La difficulté de cette imagerie est donc d’obtenir le meilleur compromis entre sensibilité et spécificité. En pratique, on distingue les cancers résécables, les cancers localement avancés non résécables et les cancers au stade de métastases.


Les critères absolus de non résécabilité sont(12) :

                                                             

- UN ENVAHISSEMENT VASCULAIRE ARTERIEL : tronc coeliaque, artère hépatique ou artère mésentérique supérieure

- UN ENVAHISSEMENT DE LA LAME RETROPORTALE (tumeurs de la tête et du crochet)

 

- UN ENVAHISSEMENT GANGLIONNAIRE METASTATIQUE A DISTANCE

  • les critères d’envahissement ganglionnaire retenus sont une taille > 10 mm de petit axe quelle que soit la morphologie, ou des ganglions sphériques sans hile graisseux > 5mm
  • la spécificité de ces critères est mauvaise (mais il n'existe pas d’autres critères connus), avec notamment des difficultés pour distinguer ganglions inflammatoires et ganglions envahis
  • les performances du scanner multidétecteurs sont toutefois supérieures à celles de l’échoendoscopie(18)
  • seul l’envahissement ganglionnaire métastatique, c’est à dire à distance du pancréas, contre-indique la chirurgie

 

- LA PRESENCE DE METASTASES VISCERALES (hépatiques, péritonéales, pulmonaires) compte tenu de la faible espérance de vie de 3 à 6 mois

  • le scanner offre une bonne appréciation de l’extension péritonéale et hépatique avec une sensibilité de 75%
  • l’IRM est supérieure au scanner dans la détection (intérêt des séquences de diffusion) et surtout la caractérisation des métastases hépatiques, et elle est dans ce cadre recommandée en cas de tumeur présumée résécable à l’issue du bilan TDM s’il existe un doute sur la nature d’une ou plusieurs lésions hépatiques(19)

 

UN ENVAHISSEMENT VEINEUX est une contre-indication relative à une chirurgie d’exérèse curative, certains centres pratiquant une résection veineuse avec reconstruction de l’axe veineux mésentéricoporte en cas d’envahissement veineux localisé (atteinte veineuse non étendue en proximal au niveau de l’abouchement des veines jéjunales et ne dépassant pas 2 cm de hauteur)(20)

 

Le bilan d’extension a donc pour but de préciser l’envahissement ou non des structures contre-indiquant l’exérèse dans un centre donné. L’examen de référence est la tomodensitométrie hélicoïdale multibarrettes.

Enfin, pour compléter ce bilan et avant la réalisation d’une intervention chirurgicale à visée curative, on précisera le type de vascularisation hépatique, l’existence d’éventuelles variantes anatomiques vasculaires et on s’attachera à signaler la présence ou non d’une empreinte sur l’origine du tronc coeliaque par le ligament arqué.

 

Surveillance :

La surveillance d’un adénocarcinome pancréatique opéré s’effectue par TDM, avec la réalisation systématique d’un examen de contrôle au 3ème mois post-opératoire. Les récidives sont principalement hépatiques et sur la loge de résection pancréatique.

 

 

 

Références bibliographiques :

1.      ©La situation du cancer en France en 2011. Collection Rapports & synthèses, ouvrage collectif édité par l’INCa, Boulogne-Billancourt, octobre 2011.

2.      Buffet C. Cancer du pancréas exocrine: clinique, bilandiagnostique et préthérapeutique. EMC (Elsevier Masson SAS), Hépatologie, 7-106-A-12, 2009.

3.      Bansal P, Sonnenberg A. Pancreatitis is a risk factor for pancreatic cancer. Gastroenterology 1995 juill;109(1):247-251.

4.      Chari ST, Leibson CL, Rabe KG, Timmons LJ, Ransom J, de Andrade M, Petersen GM. Pancreatic cancer-associated diabetes mellitus: prevalence and temporal association with diagnosis of cancer. Gastroenterology 2008 janv;134(1):95-101.

5.      Ahmad NA, Lewis JD, Ginsberg GG, Haller DG, Morris JB, Williams NN, Rosato EF, Kochman ML. Long term survival after pancreatic resection for pancreatic adenocarcinoma. Am. J. Gastroenterol 2001 sept;96(9):2609-2615.[

6.      Cleary SP, Gryfe R, Guindi M, Greig P, Smith L, Mackenzie R, Strasberg S, Hanna S, Taylor B, Langer B, Gallinger S. Prognostic factors in resected pancreatic adenocarcinoma: analysis of actual 5-year survivors. J. Am. Coll. Surg 2004 mai;198(5):722-731.

7.      Winter JM, Cameron JL, Campbell KA, Arnold MA, Chang DC, Coleman J, Hodgin MB, Sauter PK, Hruban RH, Riall TS, Schulick RD, Choti MA, Lillemoe KD, Yeo CJ. 1423 pancreaticoduodenectomies for pancreatic cancer: A single-institution experience. J. Gastrointest. Surg 2006 nov;10(9):1199-1210; discussion 1210-1211.

8.      Han S-S, Jang J-Y, Kim S-W, Kim W-H, Lee KU, Park Y-H. Analysis of long-term survivors after surgical resection for pancreatic cancer. Pancreas 2006 avr;32(3):271-275.

9.      Campbell JP, Wilson SR. Pancreatic neoplasms: how useful is evaluation with US? Radiology 1988 mai;167(2):341-344.

10.    Rösch T, Braig C, Gain T, Feuerbach S, Siewert JR, Schusdziarra V, Classen M. Staging of pancreatic and ampullary carcinoma by endoscopic ultrasonography. Comparison with conventional sonography, computed tomography, and angiography. Gastroenterology 1992 janv;102(1):188-199.

11.    Rösch T, Lorenz R, Braig C, Feuerbach S, Siewert JR, Schusdziarra V, Classen M. Endoscopic ultrasound in pancreatic tumor diagnosis. Gastrointest. Endosc. 1991 juin;37(3):347-352.

12.    Zins M, Petit E, Boulay-Coletta I, Jullès M-C, Molinié V, Loriau J. Tumeurs malignes du pancréas. Dans: Imagerie de l’abdomen. Paris: Vilgrain V, Regent D.; 2010 p. 405-420.

13.    Boll DT, Merkle EM. Differentiating a chronic hyperplastic mass from pancreatic cancer: a challenge remaining in multidetector CT of the pancreas. Eur Radiol 2003 déc;13 Suppl 5:M42-49.

14.    Chandarana H, Babb J, Macari M. Signal characteristic and enhancement patterns of pancreatic adenocarcinoma: evaluation with dynamic gadolinium enhanced MRI. Clin Radiol 2007 sept;62(9):876-883.

15.    Park HS, Lee JM, Choi HK, Hong SH, Han JK, Choi BI. Preoperative evaluation of pancreatic cancer: comparison of gadolinium-enhanced dynamic MRI with MR cholangiopancreatography versus MDCT. J Magn Reson Imaging 2009 sept;30(3):586-595.

16.    Kartalis N, Lindholm TL, Aspelin P, Permert J, Albiin N. Diffusion-weighted magnetic resonance imaging of pancreas tumours. Eur Radiol 2009 août;19(8):1981-1990.

17.    Nishiharu T, Yamashita Y, Abe Y, Mitsuzaki K, Tsuchigame T, Nakayama Y, Takahashi M. Local extension of pancreatic carcinoma: assessment with thin-section helical CT versus with breath-hold fast MR imaging--ROC analysis. Radiology 1999 août;212(2):445-452.

18.    Elise Neveu Bruère ; sous la direction de Marie Besson / [S.l.] : [s.n.] , 2010. Analyse de la taille tumorale et du statut ganglionnaire pré-opératoires des adénocarcinomes du pancréas et de la papille par le scanner multidétecteurs [Texte imprimé] : expérience tourangelle /.

19.    Schima W, Ba-Ssalamah A, Goetzinger P, Scharitzer M, Koelblinger C. State-of-the-art magnetic resonance imaging of pancreatic cancer. Top Magn Reson Imaging 2007 déc;18(6):421-429.

20.    Lall CG, Howard TJ, Skandarajah A, DeWitt JM, Aisen AM, Sandrasegaran K. New concepts in staging and treatment of locally advanced pancreatic head cancer. AJR Am J Roentgenol 2007 nov;189(5):1044-1050.

21.    Hough TJ, Raptopoulos V, Siewert B, Matthews JB. Teardrop superior mesenteric vein: CT sign for unresectable carcinoma of the pancreas. AJR Am J Roentgenol 1999 déc;173(6):1509-1512.

22.    Moody AR, Poon PY. Gastroepiploic veins: CT appearance in pancreatic disease. AJR Am J Roentgenol 1992 avr;158(4):779-783.