Imagerie digestive

post-opératoire

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Chirurgie du cancer du rectum

anastomose_colo_sus_anale

 

Principes de la chirurgie carcinologique des tumeurs rectales

Les amputations abdominopérinéales ne sont plus que rarement pratiquées en raison du développement des techniques d'anastomoses basses (anastomoses colo-anales et colo-rectales basses), permettant aujourd'hui de conserver la fonction sphinctérienne chez plus de 80 % des patients (1). Le taux de mortalité est faible et le taux de morbidité est d'environ 11.9% (2, 3).

La résection totale du mésorectum pour toute tumeur sous-péritonéale (c'est-à-dire du moyen et du bas rectum) a permis de réduire le taux de récidives locales à 5 ans à moins de 10 %, tout en diminuant le risque de complications sexuelles (qui concernent encore environ 20 % des patients).
 

  • Une tumeur du haut rectum  est opérée comme une tumeur du sigmoïde (situation intra-péritonéale) : Il s'agit des lésions dont le pôle inférieur est à plus de 10 cm de la marge anale : Elles nécessitent une section du rectum et surtout du mésorectum 5 cm sous le pôle inférieur de la tumeur. La résection totale du mésorectum n'est pas nécessaire et le rétablissement de la continuité peut se faire par une anastomose colo-rectale haute sans réservoir.
  •  Les tumeurs du bas et du moyen rectum sont les tumeurs tout ou en partie sous péritonéales, l'exérèse totale du mésorectum est la référence avec un rétablissement de la continuité soit par une anastomose colo-rectale très basse, soit par une anastomose colo-anale avec réservoir colique.
    Pour être carcinologiquement efficace, il faut passer 1 cm en dessous du pôle inférieur de la lésion.

  

Chirurgie conservatrice : Protectomie avec préservation sphinctérienne (4, 5)

  • De façon relativement récente, afin d'améliorer la continence et la fonction de réservoir de l'ampoule rectale, et en se basant sur le modèle de l'anastomose iléoanale, un réservoir colique en J à partir du côlon sigmoïde non diverticulaire ou du côlon iliaque a été proposé pour les cancers du bas et moyen rectum. La taille optimale du réservoir colique est de 6-7 cm. La confection se rapproche de celle des réservoirs iléaux. Ces anastomoses avec réservoir peuvent être manuelles ou mécaniques, selon la technique du double agrafage.
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  • Plus récemment encore, d'autres procédés de reconstruction comme les coloplasties ou les anastomoses colo-anales latéro-terminales ont été comparées au réservoir colique, avec des résultats très voisins. Ce sont donc deux alternatives au réservoir colique en J qui reste la technique de référence. La coloplastie transverse consiste en une incision longitudinale de 7-10 cm à partir du segment distal du côlon suivie d'une fermeture transversale. Elle trouve son intérêt dans certaines conditions anatomiques telles que pelvis étroit ou un long canal anal. Une résection partielle, voire subtotale du sphincter interne (résection intersphinctérienne) peut être envisagée pour certaines tumeurs du très bas rectum, associée à une anastomose colo-anale.
  • Une stomie (iléo- ou colostomie) latérale de dérivation est en règle confectionnée et refermée six semaines après l'intervention.
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Indications et techniques chirurgicales (4, 5)

Le geste chirurgical d'exérèse sera différent en fonction de la localisation de la lésion. Cette résection devant répondre à deux buts, l'un carcinologique, le second fonctionnel. Il faut alors distinguer 

  • Protectomie partielle avec exerèse partielle du mésorectum et anastomose colo-rectale haute directe
    Cancers du haut rectum et charnière recto-sigmoïdienne : section du rectum 5 cm sous le pôle inférieur de la tumeur est suffisante à condition de faire une exérèse extra fasciale du mésorectum correspondant et anastomose colo-rectale (souvent termino-terminale mécanique transsuturaire)
  • Protectomie partielle avec exerèse totale du mésorectum et anastomose colo-rectale basse directe (moignon rectal > ou = 2 cm) 
    Cancer de la moitié inférieure du rectum qui ne nécessite pas une AAP ou cancer plus haut quand une anastomose par voie abdominale est techniquement impossible.
  • Protectomie partielle avec exerèse totale du mésorectum et anastomose colo-sus-anale ou colo-rectale très basse avec réservoir colique (moignon rectal < 2 cm). Anastomose à l'agrafeuse mise en place par voie trans-anale. Lorsque le réservoir colique n'est pas possible, il est possible de réaliser une anastomose colo-rectale basse latéro-terminale par voie trans-anale ou une anastomose colo-anale avec un autre type de réservoir colique appelé coloplastie transversale.
  • Protectomie totale et exérèse totale du mésorectum et anastomose colo-anale par voie périnéale.
    Elle peut se faire sur réservoir colique en J ou anastomose colo-anale intersphinctérienne. La dissection descend encore plus bas en passant entre le sphincter interne et le sphincter externe en zone macroscopiquement saine. La section est faite 1 cm sous le pôle inférieur de la tumeur par voie haute ou basse, transanale et emporte au moins les 2/3 du SI.

  


Imagerie post-opératoire normale (1, 6, 7, 8, 9)

  • Il faut s'escrimer à rechercher le plan de l'anastomose, plus facile à individualiser lorsqu'il s'agit d'une anastomose mécanique. D'autres signes indirects permettent de localiser l'anastomose comme un petit rétrécisement de calibre anastomotique fréquent, une disparité de calibre entre les portions supra et sous anastomotiques, visualisation des haustrations coliques sur le segment d'amont. 
    En cas d'anastomose mécanique, il faut étudier la continuité de la rangée d'agrafes.
    Exemple : anastomose colo-sus-anale latéro-terminale

 

  • Il faut également reconnaître le montage exact : Rechercher un éventuel réservoir colique en J, une anastomose latéro-terminale, une coloplastie.
    Le réservoir est situé juste en avant du sacrum, les deux lignes de suture mécanique réunissant les jambages sont facilement reconnues. À la partie haute, on repère les deux extrémités des anses de confection du réservoir, à ce niveau, les deux jambages du réservoir peuvent être très séparés
    En cas d'anastomose latéro-terminale, il faut reconnaître le moignon colique suturé (clips chirurgicaux).

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  • L'infiltration de la zone chirurgicale n'est pas spécifique notamment dans la région pré-sacrée, surtout lorsqu'il y a eu un temps périnéal, de même qu'une petite collection liquidienne si elle ne contient ni air ni de produit de contraste. Il existe une zone tissulaire cicatricielle fibreuse pré-sacrée ou pré-coccygienne qui persiste longtemps et ne doit pas être considérée comme une récidive tumorale.

 

 

Complications aigues et imagerie (7, 8, 9)

  • Les principales complications de la chirugie rectale sont septiques. Quelque soit le type de chirurgie, le principal risque est le développement d'une fistule anastomotique, pouvant conduire à la constitution d'un abcès, voire d'une dissémination du processus infectieux à l'ensemble de l'espace sous péritonéal. Il faut rechercher une collection en arrière du néo-rectum, là où elles se localisent le plus fréquemment.

  • Les techniques de réservoir en J et d'anastomose latéro-terminale exposent par ailleurs à un risque supplémentaire de fuite au niveau de l'extrémité borgne du néo-rectum particulièrement exposée à l'ischémie.

  • Pour les coloplasties transverses, le risque est celui d'une fuite antérieure en regard de la suture du néorectum avec comme conséquence le développement potentiel d'un abcès et d'une fuite entre la vessie et le néorectum

Exemple : Fistule anastomotique d'une anastomose colo-sus-anale avec le vagin 

 

 

 

Chirurgie non conservatrice : Amputation abdomino-périnéale

 

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Technique chirurgicale et indications (1)

  • L'amputation abdomino-périnéale (AAP) consiste à enlever la totalité du rectum, le mésorectum, l'anus et l'ensemble de l'appareil sphinctérien puis par voie périnéale, à disséquer la graisse périrectale et à sectionner les muscles releveurs  de l'anus près de leur insertion périphérique à distance du rectum. Elle nécessite une colostomie terminale définitive. Elle est de moins en moins réalisée. La réparation de la plaie périnéale varie de la simple suture à la suture sur épiplooplastie. 
  • Cette chirurgie est réalisée en cas de tumeur du très bas rectum (situées à moins de 5 cm de la marge anale) pour lesquelles une dissection intersphinctérienne est impossible (classiquement, tumeur T4 en particulier envahissant le sphincter externe).

 

 

Imagerie post-opératoire normale (6, 9)

  •  En l'absence d'épiplooplastie, la vessie bascule en arrière venant au contact du sacrum et du coccyx. Il existe très longtemps, une infiltration de la graisse pré sacrée non suspecte.
    Chez l'homme, la prostate reste fixe, les vésicules séminales basculent également en arrière.
    Chez la femme, l'utérus bascule également en arrière.
    Des anses grêles peuvent également combler l'espace rectal resté vacant.
     
  • L'IRM est l'examen de choix pour l'exploration post AAP du pelvis. Elle permet une meilleure caractérisation que le scanner des structures anatomiques déplacées (6, 9).
  • Elle permet mieux que le TDM d'analyser les rapports entre les différents organes, surtout lorsque l'anatomie post-opératoire est très remaniée.  

 

Complications précoces (1)

  • Il n'existe pas de complication aigue spécifique
  • La complication la plus fréquente est infectieuse avec la constitution d'abcès pelvien et de pelvipéritonite.
  • La hernie périnéale consiste en un prolapsus des organes pelviens, c'est une complication rare et tardive.

 

 

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Références bibliographiques

 

(1)     Lewin M, Hoeffel C, Imagerie du rectum opéré, EMC, RADIOLOGIE ET IMAGERIE MÉDICALE : Abdominale - Digestive, 2008 [33-420-A-10]

(2)    Degiuli M, Mineccia M, Bertone A, Arrigoni A, Pennazio M, Spandre M, Cavallero M, Calvo F. Outcome of laparoscopic colorectal resection. Surg Endosc. 2004 Mar;18(3):427-32. Epub 2004 Feb 2. Review. PubMed PMID: 14752626.

(3)    Köckerling F, Rose J, Schneider C, Scheidbach H, Scheuerlein H, Reymond MA, Reck T, Konradt J, Bruch HP, Zornig C, Bärlehner E, Kuthe A, Szinicz G, Richter HA, Hohenberger W. Laparoscopic colorectal anastomosis: risk of postoperative leakage. Results of a multicenter study. Laparoscopic Colorectal Surgery Study Group (LCSSG). Surg Endosc. 1999 Jul;13(7):639-44. PubMed PMID: 10384066.

(4)     Tytherleigh MG, McC Mortensen NJ. Options for sphincter preservation in surgery for low rectal cancer. Br J Surg. 2003 Aug;90(8):922-33. Review. PubMed PMID: 12905543.

(5)     Machado M, Nygren J, Goldman S, Ljungqvist O. Similar outcome after colonic pouch and side-to-end anastomosis in low anterior resection for rectal cancer: a prospective randomized trial. Ann Surg. 2003 Aug;238(2):214-20. PubMed PMID: 12894014; PubMed Central PMCID: PMC1422690.

(6)     Tan PL, Chan CL, Moore NR. Radiological appearances in the pelvis following rectal cancer surgery. Clin Radiol. 2005 Aug;60(8):846-55. Review. PubMed PMID: 16039920.

(7)    Doeksen A, Tanis PJ, Wüst AF, Vrouenraets BC, van Lanschot JJ, van Tets WF. Radiological evaluation of colorectal anastomoses. Int J Colorectal Dis. 2008 Sep;23(9):863-8. Epub 2008 Jun 17. PubMed PMID: 18560844; PubMed Central PMCID: PMC2493516.

(8)    Lim M, Akhtar S, Sasapu K, Harris K, Burke D, Sagar P, Finan P. Clinical and subclinical leaks after low colorectal anastomosis: a clinical and radiologic study. Dis Colon Rectum. 2006 Oct;49(10):1611-9. PubMed PMID: 16990979.

(9)    Hoeffel C, Arrivé L, Mourra N, Azizi L, Lewin M, Tubiana JM. Anatomic and pathologic findings at external phased-array pelvic MR imaging after surgery for anorectal disease. Radiographics. 2006 Sep-Oct;26(5):1391-407. Review. PubMed PMID: 16973771.